martes, 21 de mayo de 2013

Hiromi Shinya, La enzima prodigiosa

La enzima prodigiosa, Hiromi Shynia

Una forma de vida sin enfermar

La dieta del futuro que evitará las enfermedades cardíacas, curará el cáncer, detendrá la diabetes tipo 2, combatirá la obesidad y prevendrá padecimientos crónico degenerativos.
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René Fallet, La soupe aux choux


René Fallet, La soupe aux choux
Éditions Denoël, 1980

Livre lu en mai 2013
D'après son auteur lui-même, l'œuvre de René Fallet est irriguée par deux artères principales, la veine whisky où se noient les amants déchirés de ses romans d'amour : Les Pas perdus, Paris au mois d'août, Charleston, Comment fais-tu l'amour, Cerise ?, L'Amour baroque, Y a-t-il un docteur dans la salle ?, etc. et la veine beaujolais qui arrose de plus heureux personnages, ceux du Triporteur, des Vieux de la Vieille, d'Un idiot à Paris, du Braconnier de Dieu et, bien sûr, les héros du Beaujolais nouveau est arrivé. Ceux de La Soupe aux choux appartiennent sans conteste à ce dernier courant de vin rouge, de truculence et de joie.

Résumé :
Deux vieux paysans, deux amis, le Cicisse Chérasse et le Glaude Ratinier, achèvent modestement leur existence aux confins d'un village bourbonnais en voie de disparition. Au son de leurs verres entrechoqués, ils voient tout changer autour de leurs sabots, des étrangers s'installer dans leur pays, s'éteindre les cheminées, la vie s'accélérer sans eux. Il ne se passera plus rien dans la leur.
Et pourtant si ! Une nuit, une soucoupe volante se pose dans le champ de Glaude. Un extra-terrestre en sort, que le Glaude appellera « la Denrée ». La Denrée vit dans un austère astéroïde où les notions de superflu sont inconnues. L'absorption d'une assiette de soupe aux choux va plonger le voyageur interstellaire dans un tout autre monde, celui du plaisir de vivre, celui aussi de l'amitié. Et ce sera la révolution sur sa planète. Quant au Cicisse et au Glaude, ils vont connaître une fin de vie plutôt inattendue !
Tout cela parce que La Soupe aux choux contient tous les pouvoirs tendres, comiques, hauts en couleur et poétiques dont la charge l'auteur jusqu'à en faire déborder irrésistiblement la marmite. Dans ce « roman campagnard de science-fiction », la verve inimitable de René Fallet ruisselle de plus belle. Littéralement : à cœur joie. Avis aux amateurs:
-Vous en reprendrez bien une assiette ?


Quelques passages retenus au cours de la lecture :
Page 9 : sur le village (hameau des Gourdiflots)
On le prenait, par exemple, pour la Bourgogne, tout comme on prit jadis le Pirée pour un homme et les pendentifs de ma tante pour ceux de mon oncle.
Page 10 : le curé du village
Certes, il demeurait encore un ecclésiastique affecté au chef-lieu de canton mais, appartenant à nous, il n'était en fait à personne. Pour le coup, le saint homme avait été aigrement surnommé par ses ouailles éparpillées « le prêtre-à-porter ».  

Pages 17-18 :
Il subsistait encore, vaille que vaille, au hameau des Gourdiflots, deux « exotiques » comme on les désignait, deux fossiles de la plus belle eau, deux pauvres chtites créatures de ce pauvre vieux Bon Dieu de Bon Dieu. Le premier de ces derniers des Mohicans, de ces fruits secs, tannés, confits dans le vin rouge, de ces insolites d'un autre temps rejetés par l'électronique et même par le moteur à explosion, le premier donc de ces deux druides de la chopine s'appelait Francis Chérasse, dit « Cicisse », dit « Le Bombé », vu qu'il était un tout petit chouilla bossu sur les bords et aux entournures. Le second, c'était Claude Ratinier, « Le Glaude », comme on prononçait par chez-lui. Un chez-lui qui tombait d'après lui quelque peu en couille, il voulait dire en quenouille.  

Page 36 : au sujet des Van Slembroucke et des étrangers en général
C'était des gens comme vous et moi. Des travailleurs, on ne pouvait pas dire le contraire. Si tous les Français étaient comme eux, on n'en serait pas là. De plus, des étrangers qu'on comprenait causer , qui disaient à peine « s'il vous plaît » pour « merci », c'était des étrangers pour rire, des victimes innocentes de la géographie, des gens qui auraient mérité d'être de chez nous. Certes, ils avaient peur des vaches, qu'ils prenaient toutes pour des taureaux, mais pas davantage que les Parisiens.  

Page 58 : les nuits de Chérasse et de Ratinier
Par cette douce soirée de printemps, ils étaient assis côte à côte sur le banc de Chérasse, tout juste séparés par l'épaisseur d'un litre. Le ciel était d'un beau bleu nuit, et il y avait autant d'étoiles là-dedans que de lettres dans un bouillon gras. Souvent, avant d'aller au lit, ils prenaient le frais ainsi, et bavardaient ou se taisaient une heure, le nez braqué vers la lune, sirotant avec componction leur canon, insoucieux des zigzags des chauves-souris de feutre, attentifs aux soupirs, aux feulements nocturnes d'une campagne qui ne parvenait pas à trouver le sommeil et se retournait sur sa couche.

Page 59 : l'engouement des deux compères pour le vin
Rentrés dans l'ombre, ils s'entendirent boire une gorgée de vin, savourant leur plaisir en sybarites éprouvés.
Pages 59-60 : sur les pets de Chérasse et de Ratinier
… Ils regardèrent, l'un la Grande Ourse et l'autre la Petite. Remué par tant de poésie céleste, le Bombé leva délicatement une fesse, émit un pet plus foudroyant qu'un uppercut, qui monta jusqu'au contre-ut avant de s'achever par une phrase de morse en suave dégradé. Là-dessus, Chérasse attendit avec intérêt le jugement de l'auditoire.
-Pas vilain, apprécia Ratinier, amateur éclairé s'il en fut, virtuose lui-même de l'instrument en question, base essentielle de la communicabilité entre deux êtres imprégnés de simplicité bucolique.
Il ajouta peu après, l'œil rivé à l'étoile du Berger :
-Cré bon Dieu de vieille charogne, t'as un pot de chambre de cassé dans le ventre !
Flatté, le Bombé commenta sa prouesse :
-J'ai mangé des pois à midi.
-C'est donc ça…
-Des Saint-Fiacre. J'en ai ramassé gros, gros, l'an passé.
-Ça promet !
-Pas un charançon !
-C'est vrai que ça sent pas l'insecte.
Le Glaude mijotait sa revanche, puissant et concentré, ne pensant plus même à tirer sur sa cigarette. L'air retrouvait peu à peu sa pureté virgilienne quand, des entrailles, sinon de la terre, du moins de celles de l'ancien sabotier jaillit un ululement qui n'avait rien d'humain. C'était si déchirant, si poignant aussi que le Bombé en sursauté sur le banc. Ratinier triompha, hilare, après le couac subtil de la dernière note :
-Ho, l'ami ! Qu'est-ce que t'en dis, de celui-là ? Y faisait bien un kilomètre, un kilomètre et demi de long, non ?
-Pas loin, admit Cicisse beau joueur. On se demande où que tu vas chercher tout ça.
-Lard aux lentilles, expliqua la maestro sur un ton professoral. Y a pas mieux pour la sonorité. Ça fait cuivre.

Page 62 : pour remettre un verre
-T'as raison ! Remets un peu de boulets dans la chaudière !

Page 63 : sur les pets des deux artistes
Jamais les deux artistes n'avaient connu semblable condition physique, n'avaient participé à un tel festival de Bayreuth, n'avaient improvisé dans une aussi brillante jam-session.

Page 120 : du lieu d'origine de la Denrée
-L'État, c'est que voleurs et compagnie, se fourvoya le Glaude rageur en s'emplissant un verre, et ça m'étonnerait bien que ça soye autrement sur la Lune !
-Nous sommes très loin de la Lune.
-Si tu veux. Pour moi, c'est kif kif bourricot.
Cette image hardie parut échapper à la Denrée qui, en revanche, s'intéressa à l'absorption rapide de son canon par le Glaude.

Page 123 : la Denrée décrit Oxo, son lieu d'origine
La Denrée, justement, prit une voix d'instituteur :
-Eh bien, je vais vous expliquer, monsieur Ratinier. Sur Oxo, nous sommes dix mille en tout. Jamais plus, jamais moins. Et nous disparaissons tous à deux cents ans d'âge. Nous ne mourons pas dans le sens où vous l'entendez mais ça, c'est un peu plus compliqué à raconter. Nous formons une société parfaite.
-Je sais, où qu'on rigole que quand on se brûle ! ne put s'empêcher de lancer le Glaude.
La Denrée le considéra avec intérêt avant de poursuivre :
-Il n'y a, sur Oxo, hormis la nôtre, aucune vie animale. Il n'y a pas de vie végétale, non plus. Non qu'elle y soit impossible. Elle est inutile. Nous nous nourrissons d'extraits minéraux. Vous comprenez, monsieur Ratinier ?

Page 152 : rapports du Glaude avec sa femme, la Francine
Elle soupira, excédée par tant de balourdise.
-Oh ! vieux marteau !...
Ce fut ainsi, sur ces derniers mots et de cette façon, qu'ils passèrent leur seconde nuit de noces à l'hôtel du cul tourné.

Page 162 : reproches du Glaude à sa femmes sur sa tenue vestimentaire
-Qui que c'est que cette tenue qu'on n'oserait pas y mettre au bordel de Moulins ! Mais t'as perdu la boule, la Francine, qu'on voit tes deux nichons dans cette espèce de maillot de corps comme si t'avais le cul à l'air ! Et qui que c'est que ce pantalon ! C'est au cimetière qu'on t'a appris toutes ces mauvaises manières ?

Page 184 : sur la notion de plaisir sur Oxo
-Grâce à vous, ou à cause de vous, le Glaude, la notion de plaisir prend pied sur Oxo. C'est un événement considérable, une révolution. C'est pourquoi nous mettons le sourire à l'essai, puisqu'il est la manifestation extérieure du plaisir. Attention ! Nous contrôlons de près cette aventure. Même ses partisans reconnaissent à la soupe aux choux des pouvoirs destructeurs dus au ramollissement des énergies qu'elle provoque. Elle ne sera servie que sur ordonnance, à l'occasion des fêtes et des anniversaires. La rareté du plaisir en fait le prix, ont décrété nos savants.