Gayle Forman, Si je reste
OH ! Éditions
Traduit de l'anglais (États-Unis) par Marie-France
Girod
1999 - Titre original : If I stay
Gayle Forman est une
journaliste réputée, primée pour ses articles. Elle vit à Brooklyn avec son
mari et leur fille. Si je reste est
déjà un phénomène d'édition, avec une sortie mondiale dans plus de vingt pays
et une adaptation cinématographique en cours par les producteurs de Twilight.
Résumé :
Mia a 17 ans. Un petit ami, rock star en
herbe. Des parents excentriques. Des copains précieux. Un petit frère craquant.
Beaucoup de talent et la vie devant elle.
Quand, un jour, tout s'arrête. Tous ses
rêves, ses projets, ses amours. Là, dans un fossé, au bord de la route. Un
banal accident de voiture… Comme détaché, son corps contemple son propre corps,
brisé. Mia voit tout, entend tout. Transportée à l'hôpital, elle assiste à la
ronde de ses proches, aux diagnostics des médecins. Entre rires et larmes, elle
revoit sa vie d'avant, imagine sa vie d'après. Sortir du coma, d'accord, mais à
quoi bon ? Partir, revenir ? Si je reste…
"Le livre le plus émouvant depuis Twilight." Erik Feig, producteur de
Twilight
Quelques passages intéressants retenus dans ce roman:
Pages 37-38 : Le
bloc opératoire et le sang
Il y a un monde fou dans ce petit espace. Les
lumières crues permettent de voir que l'endroit est modeste, pas du tout comme
dans les séries télé, avec leurs blocs
opératoires pareils à des théâtres flambant neufs, où l'on pourrait jouer
un opéra. Le sol brille, mais on aperçoit des éraflures et des traînées
roussâtres que je suppose être d'anciennes traces de sang.
Quant à mon propre sang, il y en a partout.
Ce qui n'impressionne pas le moins du monde les médecins. Ils taillent,
tranchent, aspirent et suturent dans ce liquide rouge comme si de rien n'était.
Pendant ce temps, ils m'injectent sans cesse du sang frais dans les veines.
Pages 38-39 : Travail
des chirurgiens – Dans quel état de santé je me trouve ?
L'intervention n'en finit pas. Je n'en peux
plus. Je me demande comment les
chirurgiens tiennent le coup. Leur tâche semble aussi éprouvante que de
courir un marathon.
Je commence à m'interroger sur l'état dans lequel
je me trouve. Si je ne suis pas morte (et je ne dois pas l'être puisque le moniteur cardiaque continue ses
bips-bips) et si je ne suis pas non plus à l'intérieur de mon corps,
puis-je aller ailleurs ? Me transporter sur une plage ou au Carnegie Hall de
New York ? Me rendre auprès de Teddy ?
Juste pour voir, je fronce le nez comme dans
Ma sorcière bien-aimée. Rien ne se passe. Je claque des doigts, puis des
talons. Toujours rien. Je n'ai pas bougé.
Page 39 : les
doutes que produit l'état comateux
Un peu plus loin, je découvre plusieurs salles d'opération, occupées par des
personnes endormies. Si elles sont toutes dans mon cas, pourquoi ne puis-je
voir leur être dédoublé ? Les autres sont-ils en train de se balader comme je
semble le faire ? J'aimerais rencontrer quelqu'un dans mon cas. J'ai des
questions à poser. Quel est cet état dans lequel je me trouve ? Comment vais-je
en sortir ? Pourrai-je réintégrer mon corps ? Dois-je attendre que les médecins
me réveillent ?
Page 44 : Unité de
soins intensifs
On vient de me transférer de la salle de réveil à l'unité de soins intensifs du service
de traumatologie, une pièce en « U » avec une dizaine de lits. Des
infirmières s'y affairent en permanence. Elles prennent connaissance des informations débitées par les appareils qui
enregistrent nos signes vitaux. Au milieu de la salle, il y a d'autres
ordinateurs et un grand bureau où se tient une autre infirmière.
Un infirmier et une infirmière s'occupent de
moi, en plus des médecins qui font des visites constantes. …
Page 45 : Les
tubes et les tuyaux
Je suis hérissée d'un nombre incalculable de tubes et de tuyaux. Il y en a un dans ma
gorge qui respire à ma place, un qui passe par mon nez et maintient mon estomac
vide, un autre qui m'hydrate, planté dans une veine. J'en ai aussi plusieurs
sur le torse, sans compter celui qui enregistre mon rythme cardiaque à partir
de mon doigt et la sonde qui vide ma vessie. Le respirateur, lui, a un rythme apaisant comme un métronome.
Pages 62-63 : les
paupières
Les médecins vont et viennent. Ils soulèvent
mes paupières et braquent le faisceau d'une petite lampe sur ma pupille avec
des gestes brusques et pressés. On dirait que pour eux des paupières ne
méritent pas d'être manipulées avec douceur. Cela me fait penser que dans la
vie on touche rarement les yeux des autres. Parfois, un parent soulève la
paupière d'un enfant pour ôter une poussière de son œil, ou un garçon dépose un
baiser léger comme un papillon sur la paupière de sa petite amie, juste avant
qu'elle s'endorme. Mais les paupières n'ont pas l'habitude d'être rudoyées, au
contraire des coudes, des genoux ou d'autres parties du corps.
Page 66 : C'est le
patient en état de coma qui décide de revenir ou pas à la vie
« Vous croyez que tout dépend des
médecins, ou des infirmières, ou de cet équipement ? poursuit-elle en tendant
la main vers le mur d'appareils médicaux. Eh bien, non. C'est elle qui mène le
jeu. Alors, parlez-lui. Dites-lui qu'elle peut prendre tout le temps qu'elle
veut, mais qu'elle revienne. Vous l'attendez. »
Page 68 : Le
mariage excentrique des parents de Mia
En se mariant, maman est donc entrée dans une
famille nombreuse et relativement normale. Elle a accepté d'épouser papa alors
qu'ils n'étaient ensemble que depuis un an. Bien sûr, ils l'ont fait à leur
manière. C'est-à-dire devant une juge de paix lesbienne, tandis que leurs amis
jouaient à la guitare amplifiée une version bruyante de la Marche nuptiale. La mariée portait une robe blanche à franges et
des bottes de cow-boy noires, le marié était vêtu de cuir.
Page 71 : Mia
prend conscience du fait que son retour à la vie dépend d'elle
Au même moment, les paroles de l'infirmière
me reviennent. C'est elle qui mène le
jeu. Et soudain, je comprends le véritable sens de la question de mon
grand-père. Car lui aussi a entendu la phrase prononcée par l'infirmière.
Si je reste. Si je
vis. C'est moi qui décide.
Cela ne dépend pas
des médecins. Leurs histoires de coma artificiel, c'est du bla-bla. Cela ne dépend pas non plus des anges,
qui brillent par leur absence. Cela ne
dépend même pas de Dieu qui, s'Il existe, ne se montre pas en ce moment.
Mais de moi.
Page 135 : les
personnes qui envisagent leurs obsèques et les autres
« D'après mon amie Kim, ai-je dit, c'est
signe de profondeur d'âme. Pour elle, le monde est divisé entre les personnes
qui envisagent leurs obsèques et les autres. Les artistes et les gens brillants
appartiennent à la première catégorie.
-Et toi ? a demandé Adam.
-Moi, je veux le Requiem de Mozart. » Me
tournant vers mes parents, j'ai ajouté : « Rassurez-vous, je n'ai pas
envie de me suicider ! … »
POSTFACE DE
L'ÉDITEUR – Aux frontières de la mort
La mort qui vient
la mort qui va la mort vécue
La mort visible
boit et mange à mes dépens
Paul Éluard, Le temps déborde : Notre vie, 1947
à Des
expériences édifiantes
Ils sont nombreux ceux qui sont allés aux extrêmes limites de la vie. Deux à
trois millions en France, estime-t-on. Revenus parmi nous, après un passage
plus ou moins long dans « l'entre-deux »,
ils racontent. Leurs récits présentent
d'étranges similitudes, mais comportent aussi des variantes très personnelles,
comme tout ce qui est humain. Ainsi, dans
le roman de Gayle Forman, la musique, on l'a vu, revêt une importance particulière.
Ces histoires sont hautement édifiantes
– au double sens du terme –, dans la mesure où elles nous invitent à méditer sur des problèmes
philosophiques, moraux et religieux, fondamentaux et fortement imbriqués,
et qui hantent la conscience humaine.
Depuis l'Égypte antique, des témoignages concernant les EMI (Expériences
de mort imminente – en anglais NDE : Near Death Experience)
sont légion et retiennent maintenant l'attention des scientifiques de
nombreuses disciplines qui les répertorient et les analysent. Évoquons quelques
cas parmi les plus significatifs…
Les Égyptiens ont cherché à provoquer par étouffement
un état voisin d'une EMI. Pharaon
y était soumis, car il devait être initié aux mystères de l'au-delà. Et les
différentes étapes du voyage dans l'après-vie ressemblent étonnamment à celles
que décrivent aujourd'hui ceux qui ont vécu une expérience similaire. Dans La République (vers 370 av. J.-C.), Platon évoque le mythe d'Er, le Pamphylien, ressuscité après une bataille, dont l'âme revient sur
terre après avoir cheminé au royaume des morts. Là encore, on relève d'étranges
similitudes avec des témoignages contemporains ou avec des récits du bouddhisme tibétain sur le Bardo-Thödol (« intervalles entre les
réincarnations »), le Livre des
morts tibétain. Plutarque
(46-120 apr. J.-C.), dans ses Moralia,
et Plotin (204-270
apr. J.-C.), dans ses Ennéades,
rapportent des histoires très semblables.
Au Moyen Âge, on voit dans les légendes de la Table ronde Perceval pendu par des
brigands et qui en réchappe après avoir vécu une étrange EMI. Le temps s'est,
pour lui, brusquement figé, et il a pu pénétrer dans une dimension extraordinaire
où brillait la lumière ineffable du Graal, « faite d'amour et de
connaissance absolus ». À la fin du XVIe siècle, Montaigne, victime d'un grave accident,
relate dans ses Essais cette étrange
approche de la mort qui lui a permis de l'« apprivoiser ». « Il
me semblait que la vie ne me tenait plus qu'au bout des lèvres : je fermais les
yeux pour aider, ce me semblait, à la pousser hors, et prenais plaisir à
m'alanguir et à me laisser aller. C'était une imagination qui ne faisait que
nager superficiellement en mon âme, aussi tendre et aussi faible que tout le
reste, mais à la vérité non seulement exempte de déplaisir, [mais] mêlée à
cette douceur que sentent ceux qui se laissent glisser au sommeil…»
…
On pourrait également citer le film
documentaire de Françoise Gilliand, Aux frontières de la mort, réalisé
par la Télévision Suisse Romande, dans lequel quatre personnes témoignent avec
émotion de l'expérience qui a bouleversé leur vie et nous emmènent parfois
au-delà du « scientifiquement correct ». Refroidies par le
scepticisme de leur entourage, elles n'en avaient jusque-là guère parlé…
à Partir et revenir
Le médecin américain Raymond Moody, docteur
en philosophie, a été l'un des premiers à rapporter les témoignages de
personnes ayant subi une EMI et à tenter d'en dégager des constantes. Dans La vie après la vie, ouvrage de
référence qui a connu un succès mondial retentissant, il livre les récits de
150 Américains ayant échappé à la mort. À grands traits, l'éditeur résume ainsi
leur extraordinaire expérience : « Un homme meurt, entend le constat du
médecin, se voit sur son lit de mort, entouré de ses proches […]. Un
bourdonnement retentit, et c'est la traversée du tunnel […] jusqu'à un lieu de
paix et de beauté. L'homme, abandonnant son ancien corps, marche vers un être
de lumière. Soudain un mur ! Et c'est le retour à la vie terrestre… ».
Depuis, de nombreuses études menées par
d'éminents spécialistes de toutes disciplines ont été publiées, ainsi qu'un
second livre du Dr Moody : Lumières
nouvelles sur la vie après la vie. On peut dégager, malgré quelques
variantes, un schéma type de toutes ces expériences, qui laisse apparaître sept
étapes. (cf. document scanné)
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