miércoles, 7 de diciembre de 2011

Guillaume Musso, La fille de papier

GUILLAUME MUSSO

Né en 1974, Guillaume Musso, passionné de littérature depuis l'enfance, commence à écrire alors qu'il est étudiant. Paru en 2004, son roman Et après... est vendu à près de deux millions d'exemplaires. Cette incroyable rencontre avec les lecteurs, confirmée par l'immense succès de tous ses romans ultérieurs, Sauve-moi, Seras-tu là?, Parce que je t'aime, Je reviens te chercher et Que serais-je sans toi?, fait de lui un des auteurs français favoris du grand public, traduit dans le monde entier, et plusieurs fois adapté au cinéma.
Son dernier roman, La fille de papier, est paru chez XO Éditions en 2010.

"Guillaume Musso publie probablement son meilleur roman. L'intrigue est très bien ficelée, et la chute particulièrement soignée et surprenante."
Blaise de Chabalier, Le Figaro Littéraire

"La fille de papier est un délicieux tour de magie."
Pierre Vavasseur, Le Parisien


À quoi servent les livres s'ils ne ramènent pas vers la vie, s'ils ne parviennent pas à nous y faire boire avec plus d'avidité ?

Henry Miller



S'intéresser à la vie de l'écrivain parce qu'on aime son livre, c'est comme s'intéresser à la vie du canard parce qu'on aime le foie gras.

Margaret Atwood (Prologue, page 11)



(Roman lu au mois d'août 2011)

 Passages intéressants recueillis ci-dessous:

Page 18 : à propos d'Aurore Valancourt

Sans sa plastique et son visage d'ange, elle ne serait qu'une musicienne ordinaire, car le « phénomène Valancourt » ne repose sur rien d'autre qu'une machine bien huilée qui a réussi habilement à transformer une honnête interprète en une star adulée. 

… son immaturité musicale n'ait pas empêché un public, tout acquis de son image, de l'applaudir à tout rompre.

Page 25 : Le créateur de La trilogie des anges arrêté en état d'ivresse

Menotté et placé dans une cellule de dégrisement, il avait, selon les autorités, plus de 1,6 gramme d'alcool dans le sang, contre les 0,8 gramme autorisés en Californie.

Page 26 : La sortie du dernier tome de La trilogie des anges retardée

Ce retard aurait pour cause les récents déboires de son auteur après une rupture sentimentale mal digérée qui l'aurait plongé dans une profonde déprime.

Page 31 : Cesare Pavese

Il arrive qu'une femme rencontre une épave et qu'elle décide d'en faire un homme sain. Elle y réussit parfois. Il arrive qu'une femme rencontre un homme sain et décide d'en faire une épave. Elle y réussit toujours.

Page 49 : Emily Brontë

Si vide d'espoir est le monde du dehors que deux fois plus précieux m'est le monde du dedans.

Page 59 : Alec Covin

L'enfer existe, et je sais maintenant que son horreur repose en ceci qu'il n'est fait que de lambeaux de paradis.

Page 71 : Friedrich Nietzche

Il faut avoir un chaos en soi pour accoucher d'une étoile qui danse.

Page 79 : Stephen King

Les muses sont des fantômes, et il leur arrive d'entrer en scène sans y être invitées.

Page 83 : Lou Andreas-Salomé

Le monde ne te fera pas de cadeau, crois-moi. Si tu veux avoir une vie, vole-la.

Page 87 : à propos des stalkers

… mais je savais que beaucoup de stalkers (individus psychologiquement instables qui harcèlent, persécutent et parfois agressent les célébrités) étaient psychotiques et que leur passage à l'acte pouvait être impulsif et violent. Je pris donc ma voix la plus rassurante pour essayer de la raisonner de nouveau…

Page 95 : Nancy Huston

L'esprit des romanciers est habité, voire possédé par leurs personnages, tout comme l'esprit d'une paysanne superstitieuse par Jésus-Marie-Joseph, ou celui d'un fou par le diable.

Page 107 : Anonyme

Les amis sont les anges qui nous soulèvent lorsque nos ailes n'arrivent plus à se rappeler comment voler.

Page 120 : Création et maladie mentale

À nouveau, j'avais envie de me colleter avec la réalité, même si je devais y laisser ma peau.

Depuis longtemps, j'étais fasciné par les liens ténus entre création et maladie mentale. Camille Claudel, Maupassant, Nerval, Artaud avaient peu à peu sombré dans la folie. Virginia Woolf était allée se noyer dans une rivière ; Cesare Pavese s'était fini aux barbituriques dans une chambre d'hôte ; Nicolas de Staël s'était défenestré ; John Kennedy Toole avait relié le pot d'échappement à l'habitacle de sa voiture… Sans parler du père Hemingway qui s'était fait sauter la tronche d'un coup de carabine. Idem pour Kurt Cobain : une balle dans le crâne, un petit matin blême près de Seattle, avec, en guise d'adieu, un mot griffonné à destination de son ami d'enfance imaginaire : « Mieux vaut brûler franchement que s'éteindre à petit feu. »

Page 122 : Industrie de l'entertainment

Une partie de l'industrie de l'entertainment adulait Sophia Schnabel.

Page 123 : Establishment du divertissement

Des fichiers confidentiels, normalement verrouillés par le secret médical, mais qui pourraient, s'ils étaient rendus publics, dynamiter l'establishment du divertissement et faire tomber des têtes dans le monde politique et judiciaire.

Page 151 : Réplique du film Pulp Fiction de Quentin Tarantino

C'est à une demi-heure d'ici. J'y suis dans dix minutes.

Page 175 : Victor Hugo

L'enfer est tout entier dans ce mot : solitude.

Page 191 : Balzac

Le bonheur est une bulle de savon qui change de couleur comme l'iris et qui éclate quand on la touche.

Page 213 : Randy Pausch

Ce qui compte, ce ne sont pas les coups que l'on donne, mais ceux que l'on reçoit et auxquels on résiste pour aller de l'avant.

Page 221 : Soljenitsyne

Il a écrit une chose très juste : « Notre liberté se bâtit sur ce qu'autrui ignore de nos existences. »

Page 224 : Paroles de REM

Sur mon walkman, les paroles sombres du dernier album de REM. Beaucoup de rap aussi. Ce sont les grandes années West Coast : le flow de Dr Dre, le Gansta Funk de Snoop Doggy Dogg et la colère de Tupac. Je déteste cette musique autant que je l'aime. C'est vrai que la plupart du temps, les paroles ne volent pas haut : apologie du cannabis, insultes envers la police, sexe cru, éloge de la loi des flingues et des bagnoles. Mais au moins, elle parle de notre quotidien et de tout ce qui nous entoure : de la rue, du ghetto, de la désespérance, de la guerre des gangs, de la brutalité des flics et des filles qui se retrouvent enceintes à quinze ans et qui accouchent dans les chiottes des écoles.

Page 233 : Paul Morand

Elle était belle comme la femme d'un autre.

Page 257 : Octavio Paz

La solitude est le fond ultime de la condition humaine. L'homme est l'unique être qui se sente seul et qui cherche l'autre.

Page 263 : Dorothy Parker

L'amour, c'est comme du mercure dans la main. Garde-la ouverte, il te restera dans la paume ; resserre ton étreinte, il te filera entre les doigts.

Page 273 : Réplique du film Fight Club de Chuck Palahniuk

Avec le canon d'un flingue entre les dents, on ne prononce que les voyelles.

Page 282 : À propos des aliments ayant dépassé la date de péremption

Chaque soir, une foule toujours plus nombreuse de SDF, de travailleurs précaires, d'étudiants et de retraités désargentés se pressait autour des caisses métalliques, si bien que la direction du magasin avait fini par asperger les aliments de détergent pour éviter toute récupération.

Page 289 : Stefan Zweig

Ceux qui tombent entraînent souvent dans leur chute ceux qui se portent à leur secours.

Page 301 : Françoise Sagan

Aimer quelqu'un, c'est aussi aimer le bonheur de quelqu'un.

Page 305 : Elsa Triolet

Le lecteur peut être considéré comme le personnage principal du roman, à égalité avec l'auteur, sans lui, rien ne se fait.

Page 309 : Le monde imaginaire – Auteur et lecteur

-… Pour toi, qui crée le monde imaginaire ?

-C'est toi ! Enfin, je veux dire, c'est l'écrivain.

-Oui, mais pas tout seul. Moi, je ne fais que la moitié du travail.

-Et qui fait l'autre moitié ?

-Le lecteur…

Il me dévisagea, l'air encore plus complexe.

-Regarde ce qu'écrivait Voltaire en 1764, dis-je en lui donnant mes notes.

Il se pencha sur mes feuilles et lut à haute voix :

Les livres les plus utiles sont ceux dont les lecteurs font eux-mêmes la moitié. »

Je me levai de ma chaise et déroulai mon exposé avec conviction :

-Au fond, c'est quoi un livre, Milo ? De simples lettres alignées dans un certain ordre sur du papier. Il ne suffit pas d'avoir mis le point final à un récit pour le faire exister. J'ai dans mes tiroirs quelques débuts de manuscrits non publiés, mais je les considère comme des histoires mortes parce que personne n'a jamais jeté un œil dessus. Un livre ne prend corps que par la lecture. C'est le lecteur qui lui donne vie, en composant les images qui vont créer ce monde imaginaire dans lequel évoluent les personnages.

Notre conversation fut interrompue par la bibliothécaire sous-employée qui proposa à Milo une tasse de son chocolat aux épices. Mon ami prit une gorgée de cacao avant de remarquer :

-Chaque fois qu'un de tes livres sort en librairie et qu'il commence à vivre sa vie, tu me dis toujours qu'il ne t'appartient plus vraiment…

-Exact ! Il appartient au lecteur qui prend le relais en s'appropriant les personnages et en les faisant vivre dans sa tête. Parfois, il interprète même à sa façon certains passages, leur donnant un sens qui n'était pas celui que j'avais en tête au départ, mais ça fait partie du jeu !

Milo m'écoutait avec attention tout en griffonnant sur mon bloc :

Je croyais dur comme fer à cette théorie. J'avais toujours pensé qu'un ouvrage n'existait vraiment qu'à travers sa relation avec le lecteur. Moi-même, depuis que j'étais en âge de lire, j'avais toujours cherché à m'enfoncer le plus loin possible dans l'imaginaire des romans qui me plaisaient, anticipant, échafaudant mille hypothèses, cherchant toujours à avoir un coup d'avance sur l'auteur et prolongeant même dans ma tête l'histoire des personnages bien après avoir tourné la dernière page. Au-delà des mots imprimés, c'est l'imagination du lecteur qui transcendait le texte et permettait à l'histoire d'exister pleinement.

-Donc, si j'ai bien compris, pour toi l'écrivain et le lecteur coopèrent pour créer le monde imaginaire ?

-Ce n'est pas moi que le dis, Milo, c'est Umberto Eco ! C'est Jean-Paul Sartre ! rétorquai-je en lui tendant le livre ouvert dans lequel j'avais souligné cette phrase : « La lecture est un pacte de générosité entre l'auteur et le lecteur ; chacun fait confiance à l'autre, chacun compte sur l'autre. »

Page 315 : Romain Gary

La nuit j'ai eu froid, je me suis levé et je suis allé lui mettre une deuxième couverture.

Page 341 : Martin Luther King

Rien n'est plus tragique que de rencontrer un individu à bout de souffle, perdu dans le labyrinthe de la vie.

Page 354 : Le bookcrossing

Le bookcrossing est un phénomène consistant à faire circuler des livres en les « libérant »  dans la nature pour qu'ils puissent être retrouvés et lus par d'autres personnes, qui les relâcheront à leur tour.

Page 357 : Cesare Pavese

Tu seras aimé le jour où tu pourras montrer tes faiblesses sans que l'autre s'en serve pour augmenter sa force.

Page 381 : Harper Lee

Je voulais que tu comprennes ce qu'est le vrai courage, au lieu de t'imaginer que c'est un homme avec un fusil à la main. Le vrai courage, c'est de savoir que tu pars battu, mais d'agir quand même sans s'arrêter.

Page 399 : Christian Bobin

On peut donner bien des choses à ceux que l'on aime. Des paroles, un repos, du plaisir. Tu m'as donné le plus précieux de tout : le manque. Il m'était impossible de me passer de toi, même quand je te voyais tu me manquais encore.

Page 401 : signe du XXIe siècle

Ici, on était vraiment au XXIe siècle : chaque table se présentait sous la forme d'un poste d travail équipé d'un ordinateur donnant un accès immédiat aux ouvrages de la bibliothèque, qui avaient tous été numérisés.

Page 413 : Françoise Sagan

Le temps de lire est toujours du temps volé. C'est sans doute la raison pour laquelle le métro se trouve être la plus grande bibliothèque du monde.

Page 427 : Jerome K. Jerome

Après avoir cherché sans trouver, il arrive que l'on trouve sans chercher.

Page 437 : Romain Gary

Un très grand amour, ce sont deux rêves qui se rencontrent et, complices, échappent jusqu'au bout à la réalité.

Page 447 : Marlène Dietrich

Les seuls amis dignes d'intérêt sont ceux que l'on peut appeler à quatre heures du matin.

Page 455 : Randy Pausch

C'est le destin qui distribue les cartes, mais c'est nous qui les jouons.

Page 469 : Milan Kundera

Le romancier démolit le roman de sa vie pour, avec les briques, construire une autre maison : celle de son roman.


VOCABULAIRE :

Fédérer un public autour d'une mythologie très riche

Doté de 75 000 dollars, ce prix très convoité récompense chaque année un musicien pour sa contribution exceptionnelle à la musique classique.

Une reconnaissance qui lui ouvre la porte d'une carrière internationale

Cet investissement lui apporte un éclairage médiatique nouveau et sa notoriété dépasse alors la sphère des seuls mélomanes.

Devenir l'égérie d'une grande marque de lingerie

Peu prolixe avec la presse

Précédée de son image médiatique, la jeune et brillante musicienne continue d'exciter la curiosité.

Sans sa plastique et son visage d'ange, elle ne serait qu'une musicienne ordinaire, car le « phénomène Valancourt » ne repose sur rien d'autre qu'une machine bien huilée qui a réussi habilement à transformer une honnête interprète en une star adulée.  … son immaturité musicale n'ait pas empêché un public, tout acquis de son image, de l'applaudir à tout rompre.

Elle a traîné un long moment parmi les plus consultées sr YouTube et Dailymotion, s'attirant une ribambelle de commentaires, certains moqueurs – les plus nombreux -, d'autres plus compatissants.

Applaudissements nourris de milliers de mélomanes

Menotté et placé dans une cellule de dégrisement, il avait, selon les autorités, plus de 1,6 gramme d'alcool dans le sang, contre les 0,8 gramme autorisés en Californie.

Stalkers = individus psychologiquement instables qui harcèlent, persécutent et parfois agressent les célébrités

Adulée par l'industrie de l'entertainment = l'establishment du divertissement

Je devais ma cooptation à une actrice canadienne d'un feuilleton à succès…

… je fus bien obligé de reconnaître que je m'étais fait pigeonner dans les grandes largeurs…

-On se pèle la nouille, tu ne veux pas fermer ta fenêtre ?

-… D'ailleurs, je m'en bats la coquillette de votre Carole !

Pas le moment de se ramasser un nouveau gadin,…

La cloche de la boutique tintinnabula…

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